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Tous les bons chevaux de saut d’obstacles possèdent deux qualités. Premièrement, la capacité physique de se propulser dans les airs. Deuxièmement, la combinaison mentale de courage et un grand respect des barres – le fait de ne pas vouloir les toucher.

Dans cet article, je m’attarderai sur la première de ces deux qualités, sans pour autant minimiser la seconde. Peu importe l’aptitude physique d’un cheval, s’il n’est pas respectueux et courageux, il aura peu de succès en compétition.

Les cavaliers et entraîneurs doivent également comprendre la biomécanique de base du saut du cheval. C’est-à-dire les règles physiques déterminant ce qu’un cheval fait mécaniquement avec son corps pour générer la force de se propulser vers le haut et par-dessus un obstacle.

Nous aborderons comment le cheval utilise les différentes parties de son corps lorsqu’il saute afin que vous puissiez l’aider en tant que cavalier — en étant conscient de la manière dont votre poids et votre position l’affectent à différentes phases du saut et comment votre propre flexibilité et coordination peuvent l’aider au mieux.

La biomécanique du saut chez le cheval de sport

Qu’est-ce qui fait d’un cheval un excellent sauteur? Vous pourriez être surpris d’apprendre qu’il n’y a pas de formule idéale. Les meilleurs chevaux d’obstacles possèdent une combinaison de grande force et de coordination, mais la manière exacte dont ils utilisent leur corps pour sauter au-dessus des obstacles varie d’un cheval à l’autre.

Dans certains cas, ils compensent une faiblesse par une force différente. Dans d’autres, l’entraînement et une bonne équitation les aident à surmonter leurs points faibles. Pour comprendre cela, examinons ici en détail la biomécanique et les différentes phases du saut du cheval.

1. L’abord du saut

À l’abord d’un obstacle, le cheval rassemble son énergie pour se préparer à l’effort à venir. Il arrondit son dos pour amener ses postérieurs plus loin sous son corps à chaque foulée. Cela crée plus d’impulsion (énergie) et de suspension dans son galop.

Sur les dernières foulées précédant le saut, le cheval déplace son équilibre vers l’arrière, concentrant la puissance dans son arrière-train. Imaginez que vous enroulez un ressort avant de le relâcher. Plus il enroule son corps, plus il peut s’élancer avec force sur le saut. 

Pour maximiser ce transfert de poids, les membres diagonaux qui travaillent à l’unisson dans un galop à trois temps se dissocient tandis que les membres postérieurs s’étendent plus loin sous le corps, supportant une plus grande partie de son poids. Il en résulte une allure extrêmement rassemblée avec un rythme à quatre temps plutôt qu’à trois temps.

Contrairement à ce que l’on croit souvent, le cheval ne fait pas de foulées égales jusqu’au saut d’obstacles. Il comprime la dernière foulée avant la battue de plus d’un mètre. Ce faisant, il décélère son corps, transférant son élan vers l’avant en énergie pour la poussée verticale. Cette énergie est stockée dans ses muscles, ses tendons et ses ligaments, qui s’étirent tellement que ses boulets avant s’enfoncent presque jusqu’au sol. 

Bien que les postérieurs fournissent l’essentiel de la puissance au moment de la battue, les antérieurs jouent un rôle plus important à ce moment-là que beaucoup ne le pensent. Dans la dernière foulée à l’abord, il abaisse son garrot et fait pivoter son omoplate (os de l’épaule) vers l’arrière sous le pommeau de la selle, étendant ses antérieurs devant son corps, se préparant à les planter au sol.

Pendant ce temps, pour mieux juger l’obstacle qu’il approche, le cheval la regarde de haut en bas. Si son port de tête est dans une position plus ronde, plus fermée, entre les obstacles, il devra lever le nez à la dernière seconde pour mieux voir le saut.

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2. La battue d’appel

Lors de la battue, le cheval pose d’abord le pied avant non dominant, absorbant la majeure partie de la force. Par exemple, si le cheval galope sur le pied gauche, son pied avant droit touchera le sol en premier et se propulsera en premier. Ses membres avant raccourcissent, ramenant son corps plus près du sol et stockant de l’énergie pour le saut.

Les antérieurs quittent le sol et libèrent l’énergie stockée, augmentant la force verticale du saut. Plus le cheval sollicite rapidement et puissamment ses antérieurs, plus la poussée verticale est importante au moment de la battue.

Au moment où le cheval décolle ses antérieurs, il peut également relever sa tête et son encolure, de la même manière que vous pouvez lancer vos mains vers le haut pour vous aider à décoller du sol. L’ampleur du mouvement de la tête pendant cette phase varie considérablement d’un cheval à l’autre. Certains font un mouvement prononcé tandis que d’autres poussent leur garrot vers le haut en soulevant moins la tête et l’encolure.

Les bons cavaliers savent à quel point il est important d’empêcher leur propre équilibre de basculer vers l’avant pendant la battue d’appel. Si un cavalier commet l’erreur de prendre de l’avance sur son cheval, il ajoute son poids à l’avant-main de ce dernier au moment où il essaie de décoller du sol. Pour aider votre cheval à maximiser son ascension verticale, il est important de garder votre poids en arrière à ce moment-là. 

Au moment où les antérieurs du cheval poussent, son dos se plie comme un arc, ce qui permet à ses postérieurs de se placer sous le corps. Les postérieurs s’alignent, se préparant à pousser simultanément, souvent juste derrière les empreintes des antérieurs.

L’arrière-main subit alors un processus de compression similaire, s’accroupissant au ras du sol pour enrouler un maximum d’énergie. En général, plus le cheval fléchit ses postérieurs pendant cette phase d’appui, plus il emmagasine de puissance et plus le saut qu’il produit est important.

Ensuite, tout comme les antérieurs, les postérieurs s’étendent verticalement, libérant le rebond élastique qu’ils ont emmagasiné en déroulant les structures de soutien qui se sont étirées pendant que les pieds étaient au sol et que les articulations se fléchissaient.

La force et la souplesse des muscles, notamment les muscles fessiers et les ischio-jambiers, sont essentielles pour la propulsion. Certains chevaux compensent un avant moins puissant par un arrière très fort.

battue d'appel

3. La phase du plané

Une fois que le cheval est en l’air, la chose la plus importante qu’il puisse faire est de dégager ses membres de la trajectoire du saut. Il plie les genoux et utilise le long muscle brachio-céphalique et le muscle trapèze pour tirer ses avant-bras vers le haut et vers l’avant. Il plie ensuite fermement la partie inférieure de ses membres antérieurs. 

La plupart des chevaux courbent également leur dos et leur encolure autour du saut pour prendre la forme ronde et basculante si recherchée chez les chevaux de saut d’obstacles. Contrairement à ce que l’on croit souvent, une bonne bascule ne fait pas plus d’un centimètre de différence dans la hauteur atteinte par un cheval. Tous les chevaux de haut niveau ne sautent pas avec une bascule prononcée, mais compensent en sautant plus haut.

À mi-chemin du saut, le cheval doit inverser à nouveau son dos et son articulation lombaire pour faire basculer son arrière-train afin que ses grassets et ses postérieurs puissent franchir l’obstacle.

Au plané, le cavalier a peu d’influence sur le saut et doit simplement éviter de gêner le cheval en tirant sur les rênes, en mettant du poids sur le dos ou en changeant radicalement d’équilibre d’un côté ou de l’autre. Dans de rares cas, par exemple lorsqu’un cheval s’étire pour franchir un saut très large, le cavalier peut l’aider légèrement en déplaçant son poids vers l’avant.

le plané

4. La réception du saut

La réception d’un saut très haut est un peu comme une chute libre en apesanteur. Pendant un moment, vous n’avez aucun poids dans les étriers, jusqu’à ce que votre cheval termine la parabole du saut en touchant le sol avec ses antérieurs. Une fois de plus, en réceptionnant sur le galop à main droite, c’est le pied avant gauche qui va toucher le sol en premier, absorbant 20% de force en plus que le pied avant droit (et inversement).

Pour le cavalier, le fait que votre bas de jambe soit dans une position solide (sous votre corps et sans glisser derrière vous) vous aidera à absorber la force de réception du saut et à éviter d’être projeté vers l’avant de votre cheval.

Cette position stable vous permet également d’être mieux équilibré pour lui signaler vos intentions à la réception. Si vous vous penchez sur le côté pour signaler un virage à la réception, le cheval atterrira sur la main opposée. Si vous mettez du poids d’un côté, il se posera d’abord sur ce membre antérieur pour s’équilibrer, ce qui produira une réception au galop sur l’autre main.

L’une des fonctions essentielles des antérieurs pendant la phase de réception est d’arrêter la rotation du corps du cheval. Sans cette force d’arrêt, le cheval continuerait à basculer autour de l’obstacle et tomberait en avant. Connue sous le nom de culbute, cette chute est considérée comme l’une des plus dangereuses pour le cheval et le cavalier. Elle se produit parfois dans les courses de chevaux. S’il ne peut pas dégager ses membres rapidement, il ne pourra pas poser ses antérieurs au sol à temps pour arrêter la rotation. Heureusement, cette situation est très rare en saut d’obstacles. 

Une fois que le cheval s’est réceptionné, il a besoin de temps pour reprendre son élan vers l’avant et s’éloigner du saut au galop. La première foulée après le saut est donc généralement un peu plus courte que les foulées suivantes. Un cheval ayant une foulée moyenne de 3,50 mètres ne couvrira généralement qu’environ 3 mètres au cours de cette foulée. Lors de la foulée suivante, il s’est remis du saut et a repris son galop initial.

réception du saut

Entraînement du cheval d’obstacle

Quelle que soit leur conformation, la plupart des chevaux peuvent améliorer leurs performances grâce à un entraînement et à un conditionnement corrects.

Cela signifie qu’il faut cibler la force musculaire, la coordination et la condition physique. Les athlètes humains nous ont appris qu’une combinaison d’entraînement musculaire et d’exercices pliométriques (sauts rapides répétés, par exemple en gymnastique) produit les meilleurs gains en termes de force et de coordination. 

Chez les chevaux, la musculation permet d’augmenter la puissance dans la battue d’appel. La meilleure façon d’y parvenir est d’augmenter progressivement la hauteur des obstacles à franchir à l’entraînement.

Pour maximiser sa poussée au moment critique de la battue, votre cheval doit minimiser le délai entre l’étirement des structures de soutien (muscles, tendons et ligaments) et la battue. La fatigue musculaire contribue à ce délai. Les exercices de gymnastique sur de petits obstacles sont le meilleur moyen de réduire ce délai. Ils apprennent au cheval à coordonner les différentes parties de son corps et à synchroniser le rebond élastique de ses muscles, tendons et ligaments avec les forces de contraction musculaire. 

La condition physique et le galop sont également importants. Le fait d’intégrer le galop à l’entraînement améliore cet aspect de la condition physique et permet d’étirer et d’allonger la foulée. Cela permet également à votre cheval d’être plus contrôlable et plus équilibré lorsqu’il va vite. Il est également judicieux de s’entraîner à sauter dans un rythme soutenu et à faire des virages serré à la maison.

Que vous soyez un cavalier professionnel aguerri ou un un cavalier de loisir qui aime regarder les chevaux sauter, l’observation des différents styles peut être fascinante. Les informations que j’ai partagées ici sont le fruit de plusieurs décennies d’observation, combinées à la perspicacité des meilleurs cavaliers et à des études scientifiques éclairantes. Mais il nous reste encore beaucoup à apprendre!